Nos grandes Européennes
Sylvie GOULARD

Sylvie GOULARD

Née à Marseille en 1964, Sylvie Goulard a débuté sa carrière au Quai d’Orsay en 1989 avant de rejoindre Bruxelles en tant que conseillère politique du président de la Commission européenne (l’Italien Romano Prodi) entre 2001 et 2004, puis comme députée élue au Parlement européen sur la liste MoDem, de 2009 à 2017. Elle a ensuite été nommée ministre des Armées par Edouard Philippe. Après sa démission, Sylvie Goulard a été nommée en janvier 2018 à la direction de la Banque de France, au poste de sous-gouverneure.

10 choses à savoir sur Sylvie Goulard, candidate de la France pour être commissaire européenne

Sylvie Goulard avait brièvement été ministre des Armées au début du quiquennat, mais avait démissionné pour cause d’affaire d’emplois fictifs présumés au MoDem.
Cet article a initialement été publié en mai 2017, lorsque Sylvie Goulard a été nommée ministre des Armées.

Emmanuel Macron a proposé mercredi 28 août l’ancienne ministre Sylvie Goulard pour représenter la France au sein de la prochaine Commission européenne, a annoncé l’Elysée. Le chef de l’Etat a décidé de transmettre son nom à Ursula von der Leyen en raison de « son expérience européenne reconnue à la fois en Europe et en France », a expliqué l’Elysée. « C’est un atout majeur dans un moment crucial pour l’Europe ».

1 - Femme de tête

C’est elle qu’Emmanuel Macron avait choisie pour le poste stratégique de ministre des Armées. Elle en avait démissionné en raison des soupçons d’emplois fictifs pesant sur le parti centriste au sein du Parlement européen. En proposant son nom pour être commissaire européenne, Emmanuel Macron choisit donc une personnalité en qui il a toute confiance. De Sylvie Goulard, il dit qu’elle est « intelligente », un compliment qu’il ne distribue pas souvent. La députée européenne du MoDem de 54 ans a rejoint En Marche ! dès le début du mouvement, sans hésiter. « C’est une femme de conviction, de caractère et d’engagement », décrit son ami, le diplomate Pascal Brice, qui dirige l’Ofpra, l’Office chargé du droit d’asile.

Coïncidence : lors de son bref passage au ministère des Armées, son homologue allemande n’était autre que Ursula Van der Leyen, qui est aujourd’hui présidente de la Commission européenne.

2 - Enarque

Elle était dans la même promotion que Jean-François Copé et Nicolas Dupont-Aignan à l’ENA. La promotion « Liberté Egalité Fraternité » (1987-1989), baptisée ainsi à l’approche du bicentenaire de la Révolution.
Dupont-Aignan en garde un souvenir peu amène :
« Je la connais bien, car on était dans le même groupe de travail, nous dit-il. Elle n’était pas politisée, mais elle était déjà une européiste forcenée, à un point ahurissant. »

3 - Féministe

Elle a mené plusieurs batailles pour faire respecter la parité au sommet des institutions européennes, obtenir de l’Europe qu’elle donne l’exemple et surtout qu’elle respecte l’esprit et la lettre des directives. Mais les usages ont la vie dure. En 2012, au Parlement européen, elle a bloqué la nomination du luxembourgeois Yves Mersh, au directoire de la BCE, demandant qu’une candidature féminine soit examinée. Il a finalement été nommé.

Fin 2016, elle a déclaré sa candidature à la présidence du Parlement européen pour succéder à Martin Schulz, insistant sur le fait qu’il n’y a que des hommes à la tête des grandes institutions : Commission, présidence du Conseil, Banque centrale, Cour de Justice… Là aussi, elle n’a pas été soutenue. Son parti, l’ALDE, a préféré la candidature de Guy Verhofstadt et le poste est finalement échu à l’italien Antonio Tajani.

4 - Cinq étoiles

Elle n’a rien contre les généraux du même grade, mais supporte mal les populistes de ce nom. Sylvie Goulard avait bloqué en janvier 2017 l’entrée du mouvement « 5 étoiles » dans son groupe au Parlement européen. Le Belge Guy Verhofstadt était prêt à accueillir dans le groupe libéral-démocrate les 17 eurodéputés du mouvement populiste de Beppe Grillo. Sylvie Goulard s’est battu bec et ongles contre cette idée, lors d’une réunion du bureau du groupe, le 9 janvier dernier. Elle a fini par l’emporter.

5 - Pragmatique

Elle n’est pas contre l’idée d’une Union européenne « différenciée » :
« D’abord, ça existe, puisqu’on a Schengen et l’euro. Ensuite, l’Europe qui n’avance pas, c’est bien pire. »

6 - Polyglotte

Lorsqu’elle briguait la présidence du Parlement européen, Sylvie Goulard mettait en avant un de ses points forts : outre le français, elle parle parfaitement anglais, allemand et italien. Au point d’être capable de participer dans toutes ces langues à un débat agité sur un plateau télé et de s’adresser directement aux téléspectateurs dans toute l’Europe. « Mario Monti [l’ex-Premier ministre italien, avec qui elle a écrit “De la démocratie en Europe”(Flammarion), NDLR] m’a emmenée dans tous les grands talk-show italiens », confiait-elle à « l’Obs » fin 2016. Pas de pire baptême du feu audiovisuel, mais il en fallait davantage pour effrayer Sylvie Grassi (son nom de jeune fille), Marseillaise d’ascendance italienne et ancienne conseillère politique de Romano Prodi, à la présidence de la Commission au début des années 2000 !

7 - Catholique

Présidente de l’intergroupe de lutte contre la pauvreté au Parlement européen, c’est sans doute l’une des missions qui tenait le plus à cœur à cette catholique engagée. Elle tenait à l’engagement transpartisan - déjà - autour de cette cause essentielle et surtout à ouvrir les portes du Parlement aux associations les plus engagées et aux personnes les plus démunies - hors caméras - pour qu’ils sensibilisent leurs élus européens aux difficultés quotidiennes de leur vie. Proche de l’épiscopat, cette chrétienne-démocrate, mère de trois filles, a défendu l’accueil des réfugiés en Europe et l’ouverture au monde au nom « des exigences de l’Evangile ».

8 - Orthodoxe

Au Parlement européen, elle a beaucoup travaillé sur les nouvelles règles de discipline budgétaire et de gouvernance économique, le fameux « six pack ». Si cette fédéraliste est favorable aux euro-obligations, en matière de politique économique, elle est presque aussi orthodoxe que le ministre des Finances allemand Wolfgang Schaüble.

9 - Tête de Turc

Sylvie Goulard est depuis toujours très hostile à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. En 2005, elle avait rédigé un livre chez Fayard pour dénoncer cette perspective, « le Grand Turc et la République de Venise ». Selon elle, la Turquie était déjà trop éloignée des valeurs européennes.
Les citoyens, arguait-elle alors, refuseront ce « bradage insensé de l’UE » et « le prix à payer sera élevé car les Turcs en seront meurtris. » Le titre du livre est tiré de « l’Avare », acte II, scène V : « Il n’est point de partis au monde que je ne trouve en peu de temps le moyen d’accoupler ; et je crois, si je me l’étais mis en tête, que je marierais le Grand Turc avec la République de Venise. »

10 - Engagée

Quand en mai 2014, « l’Obs » avait organisé « le procès de l’euro », Sylvie Goulard avait immédiatement acceptée d’en être l’avocat. Le deuxième défenseur Pierre Moscovici s’étant défilé au dernier moment - raisons d’agenda - elle avait tenu à trouver une pointure pour répondre à l’accusation - Florian Philippot et l’économiste Benjamin Coriat - et avait convaincu Mario Monti d’être à ses côtés. Il avait lu une émouvante lettre « à mon fils l’euro ».

site web du NouvelObs,
Par Sophie Fay et Pascal Riché
Publié le 28 août 2019